Le directeur financier en temps partagé, l’allié discret des PME en phase de croissance
Votre chiffre d’affaires grimpe, votre équipe s’étoffe, les lignes de trésorerie se multiplient… et vos tableaux Excel commencent à ressembler à un plat de spaghettis bolognaise. Si vous vous reconnaissez, il y a de fortes chances que votre PME soit entrée dans une phase de croissance où la question financière devient stratégique.
Problème : vous n’avez ni le budget ni le besoin d’un directeur financier (DAF) à temps plein. C’est précisément là qu’entre en scène le directeur financier en temps partagé. Une solution hybride, souple, taillée pour les entreprises qui grandissent vite… mais pas au point d’absorber un salaire de cadre supérieur supplémentaire.
Voyons comment ce profil peut devenir un véritable levier de pilotage, sans faire exploser vos charges fixes.
DAF en temps partagé : de quoi parle-t-on exactement ?
Un directeur financier en temps partagé, c’est un cadre expérimenté qui intervient quelques jours par mois (ou par semaine) dans plusieurs entreprises. Il ne remplace pas votre expert-comptable, ni votre cabinet d’audit. Il vient se positionner à un autre niveau : celui de la stratégie financière, du pilotage et de la structuration.
Dans les faits, il peut :
- passer une journée par semaine chez vous ;
- assurer une mission de quelques mois pour structurer votre fonction finance ;
- intervenir de façon plus ponctuelle sur des sujets « coups de poing » (levée de fonds, rachat, crise de trésorerie…).
Il n’est pas salarié à plein temps dans l’entreprise, mais il fait partie du « staff élargi », avec parfois une adresse mail interne, un accès à vos outils, et une place au comité de direction. En bref : il est assez dedans pour comprendre les enjeux, suffisamment dehors pour garder un regard lucide.
Pourquoi les PME en croissance ont du mal avec la fonction financière
Dans beaucoup de PME, la finance ressemble à une maison construite par étapes :
- au début, le dirigeant gère tout : factures, relances, banques, prévisions « au doigt mouillé » ;
- puis un comptable arrive, souvent débordé, qui gère surtout la production comptable et fiscale ;
- les banques suivent tant bien que mal, en mode « confiance historique ».
Et puis la croissance accélère. Là, les petits défauts de fondation deviennent des fissures :
- la trésorerie devient imprévisible ;
- les marges sont floues par activité ou par client ;
- certains investissements « sentent bon », mais personne ne fait vraiment les calculs de rentabilité ;
- les banques commencent à demander des tableaux de bord… structurés.
C’est souvent à ce moment-là que le dirigeant réalise qu’il lui manque un pilote financier. Mais recruter un DAF senior à temps plein, c’est un peu comme acheter un 38 tonnes pour livrer trois palettes : surdimensionné.
Le DAF en temps partagé vient précisément combler ce vide entre « comptable + expert-comptable » et « direction financière structurée ».
Les missions concrètes d’un DAF en temps partagé
Pour comprendre l’intérêt de ce profil, le plus simple est de regarder ce qu’il fait, très concrètement, dans une PME en croissance.
Mettre de l’ordre dans la trésorerie et apaiser les nuits du dirigeant
Premier sujet : la trésorerie. Pas celle de la semaine prochaine, mais celle des six à douze prochains mois. Un DAF en temps partagé va :
- mettre en place un plan de trésorerie prévisionnel par semaine ou par mois ;
- modéliser plusieurs scénarios (croissance prudente, croissance forte, retard de paiement clients…) ;
- identifier les « trous d’air » et anticiper les besoins de financement ;
- formaliser les plans de financement à présenter aux banques ou investisseurs.
L’objectif : sortir du mode pompier permanent. On ne découvre plus un besoin de trésorerie à quinze jours, mais plusieurs mois avant, avec des options sur la table.
Structurer le pilotage : tableaux de bord, marges, rentabilité
Quand l’activité s’accélère, la pire stratégie reste de piloter à l’instinct. Même le meilleur « feeling » a besoin d’être challengé par des chiffres fiables. Le directeur financier en temps partagé va :
- mettre au clair les indicateurs clés (KPIs) vraiment utiles pour votre activité ;
- construire des tableaux de bord simples, mis à jour régulièrement ;
- analyser les marges par produit, service, client, canal… ;
- identifier les activités rentables… et celles qui consomment de la ressource sans rapporter.
Un exemple typique : cette grosse commande que tout le monde célèbre, mais qui, une fois les heures passées et les coûts indirects intégrés, s’avère à peine rentable. Sans pilotage fin, ces « belles affaires » peuvent plomber discrètement les résultats.
Négocier avec les banques et financeurs, avec un langage qu’ils comprennent
Votre banque vous aime bien, mais ce qu’elle aime surtout, ce sont les dossiers carrés. Là encore, un DAF en temps partagé change la donne :
- dossier de financement structuré, avec business plan chiffré et prévisionnel ;
- argumentaire construit sur des indicateurs rationnels, pas seulement sur « le potentiel du marché » ;
- anticipation des questions que poseront le banquier ou l’investisseur ;
- relation régulière avec les partenaires financiers, au-delà de la seule demande d’argent.
Résultat : des discussions plus équilibrées et une réelle capacité à défendre votre stratégie, chiffres à l’appui.
Accompagner les phases sensibles : levée de fonds, rachat, crise
Les moments clés de la vie d’une PME ont souvent un dénominateur commun : la complexité financière. Que ce soit pour :
- une levée de fonds (amorçage, série A, entrée d’un fonds régional…) ;
- un projet de croissance externe (rachat d’un concurrent, intégration d’une activité) ;
- une période tendue (baisse de commandes, perte d’un gros client, inflation des coûts),
le DAF en temps partagé joue un rôle de copilote. Il modélise, chiffre, alerte, sécurise. Autrement dit, il apporte de la rationalité là où l’émotionnel et le stress peuvent vite prendre le dessus.
Former et structurer l’équipe administrative et financière
Autre mission clé : faire monter en compétence votre équipe interne. Dans beaucoup de PME, on trouve :
- un(e) responsable administratif(ve) polyvalent(e) ;
- un comptable externalisé ou en temps partiel ;
- un expert-comptable en appui.
Le DAF en temps partagé va :
- clarifier qui fait quoi, avec quels outils ;
- mettre en place des procédures simples (facturation, relances, validation des dépenses, etc.) ;
- proposer des améliorations d’outils (logiciel de gestion, ERP, CRM connecté à la facturation…).
L’idée n’est pas de tout « bureaucratiser », mais au contraire de fluidifier pour que l’info financière circule proprement, sans alourdir le quotidien.
Pourquoi ce modèle est particulièrement adapté aux PME en croissance
Le directeur financier en temps partagé coche plusieurs cases essentielles pour une entreprise qui grandit vite.
Une expertise senior sans la charge d’un temps plein
Un DAF expérimenté coûte cher. Et c’est normal : il a souvent géré des budgets de plusieurs dizaines de millions, négocié avec des banques, sécurisé des croissances rapides. Mais votre PME n’a pas forcément besoin de 5 jours par semaine de ce niveau d’expertise.
Avec le temps partagé, vous payez ce dont vous avez réellement besoin :
- 1 à 4 jours par mois au démarrage ;
- puis une montée en puissance si l’activité le justifie ;
- ou, à terme, un passage de relais vers un DAF interne quand la taille le permet.
C’est un peu le principe du « sur-mesure ajustable » : vous adaptez la voilure sans vous enfermer dans des charges fixes surdimensionnées.
Un regard externe… mais engagé
Le DAF en temps partagé n’est pas plombé par les habitudes de la maison. Il peut :
- pointer les incohérences qui se sont installées dans le temps ;
- questionner certains « totems » (« On a toujours fait comme ça ») ;
- proposer des scénarios alternatifs, plus sécurisés.
Ce recul est précieux, surtout quand la croissance va vite et que tout le monde a le nez dans le guidon.
Pour autant, ce n’est pas un consultant de passage qui dépose une présentation PowerPoint et disparaît. Il met les mains dans le cambouis, suit les plans d’action, revient mois après mois. Il est suffisamment présent pour voir si les décisions prises portent leurs fruits… ou non.
Une fonction financière qui se cale sur votre rythme de croissance
La beauté du modèle, c’est sa flexibilité. Votre entreprise :
- accélère ? Vous augmentez le nombre de jours mensuels ;
- passe une zone de turbulences ? Vous mettez le focus sur la trésorerie et les plans de sauvegarde ;
- atteint une taille critique ? Vous préparez, avec lui, le recrutement de votre futur DAF interne.
Plutôt que de subir les à-coups de l’activité, vous adaptez votre dispositif financier comme un curseur. Et cette agilité, pour une PME, est un avantage concurrentiel à part entière.
Quelques signaux qui montrent que vous avez sans doute besoin d’un DAF en temps partagé
Comment savoir si ce modèle est adapté à votre situation ? Voici quelques signaux faibles (ou forts) qui devraient vous alerter :
- vous découvrez votre résultat réel plusieurs mois après la fin de l’exercice ;
- vous prenez des décisions d’investissement « au feeling », sans simulation structurée ;
- vos échanges avec la banque vous stressent, faute de dossier chiffré solide ;
- vous n’avez pas de vision claire de votre trésorerie à 3, 6 ou 12 mois ;
- votre équipe admin/finance est surchargée, et vous passez encore du temps sur des sujets financiers opérationnels ;
- vous sentez que votre boîte « change de taille », mais votre organisation financière, elle, n’a pas bougé.
Si vous cochez plusieurs de ces cases, ce n’est pas un aveu de faiblesse. C’est juste le signe que votre PME est en train de passer un cap, et qu’il est temps de lui donner les outils de pilotage qui vont avec.
Comment intégrer un DAF en temps partagé dans votre organisation
L’arrivée d’un DAF, même à temps partiel, ne doit pas se faire à la légère. Quelques bonnes pratiques pour maximiser l’impact :
- Clarifier les objectifs dès le départ : que voulez-vous prioriser ? Trésorerie ? Structuration des process ? Préparation d’une levée de fonds ?
- Lui donner accès aux bonnes infos : comptabilité, contrats, CRM, prévisionnel commercial… sans transparence, l’analyse sera bancale.
- L’intégrer au comité de direction : même s’il n’est là qu’un jour par semaine, il doit être dans la boucle des décisions stratégiques.
- Identifier un point de contact interne : souvent le directeur général ou un responsable administratif, pour fluidifier les échanges.
- Accepter le questionnement : son rôle est aussi de challenger certaines habitudes, pas de valider systématiquement l’existant.
L’idée n’est pas d’ajouter une couche de reporting pour le plaisir, mais de créer une vraie fonction de pilotage adaptée à votre taille.
DAF en temps partagé et expert-comptable : concurrence ou complémentarité ?
La question revient souvent : « Mais mon expert-comptable ne fait-il pas déjà ça ? » En réalité, les deux rôles sont différents et complémentaires.
- L’expert-comptable :
- produit les comptes annuels et les déclarations légales ;
- assure la conformité fiscale et sociale ;
- peut produire des tableaux de bord, mais avec une logique plutôt « historique ».
- Le DAF en temps partagé :
- est tourné vers l’avenir (prévisionnel, stratégie, scénarios) ;
- prend part aux décisions opérationnelles et stratégiques ;
- travaille au quotidien avec vos équipes pour piloter l’activité.
Quand les deux collaborent bien, vous gagnez sur tous les tableaux : des comptes propres, et une vision claire de l’avenir.
Et demain ? La fonction financière comme accélérateur, pas comme frein
Pendant longtemps, la finance a été perçue comme une fonction de contrôle, parfois vécue comme un frein à l’initiative. Dans une PME en croissance, c’est tout l’inverse : une bonne direction financière est un amplificateur de potentiel.
Un DAF en temps partagé, c’est la possibilité de :
- prendre plus de risques… mais mieux calculés ;
- accélérer quand les signaux sont au vert, sans mettre en péril la trésorerie ;
- rassurer vos équipes, vos partenaires et vos financeurs.
En résumé, c’est un peu comme ajouter un tableau de bord complet à une voiture que vous conduisiez jusque-là avec seulement le compteur de vitesse. Le moteur était déjà bon. Vous ajoutez simplement les instruments qui permettent d’aller plus loin, plus longtemps, sans finir sur la bande d’arrêt d’urgence.
Pour beaucoup de PME, le passage par un DAF en temps partagé est une étape de transition : un sas entre l’artisanat piloté à l’instinct et l’entreprise structurée, capable de grandir sans se renier. Et dans un environnement où tout s’accélère, cette souplesse-là n’a pas de prix.
